Conflits à l’est de la RDC : Comment l’eau potable sauve des vies ?

Four men work on a potable water well facility.
Le réservoir de captage d’eau de Bwindangoma (9m3) construit pour alimenter un réseau de 3km a été inspecté par Mercy Corps avant la mise en service.
04 Avril 2025

En janvier 2025, Mercy Corps financé par le gouvernement britannique à travers FCDO, a entrepris la construction d'infrastructures d'eau potable et d'assainissement au bénéfice des habitants des villages du groupement de Bukoma, dans la chefferie de Bwisha, située dans la zone de santé de Rutshuru, qui a été affectée par les conflits armés depuis novembre 2022. Après plusieurs séries de mouvements des populations, en 2024, plus de 10 000 ménages sont retournés dans la zone.

À la suite des évaluations des besoins des populations retournées conduites par Mercy Corps en août 2024 , deux systèmes d'adduction d'eau ont été érigés pour étendre le réseau local existant de distribution d'eau potable. Il s’agit de la construction d’un réservoir de 9 mètres cubes à Bwindangoma, desservant 10 bornes-fontaines, et un autre de 10 mètres cubes à Kihaki-Nyongera, pour alimenter 11 bornes-fontaines. « Avant cette adduction d’eau nous faisions recours à l’eau de la rivière. Malheureusement, nous attrapions des maladies liées à la consommation de cette eau de rivière », se rappelle Mauwa Twizere Kashoke, mère de huit enfants résidant à Kinyandonyi.

L'eau potable : clé d’une santé durable

« Mes administrés et ceux des entités environnantes souffraient de l’insuffisance d’eau dans leurs maisons. Notre ancienne adduction n’arrivait pas à satisfaire les besoins en eau potable dans nos villages en raison de la croissance exponentielle des populations locales. Nous buvions l’eau sale de la rivière Kibaraza, qui traverse nos villages », précise Sadiki Balibana Sebuta, chef de localité Kinyadonyi.

La pénurie d'eau potable et le recours aux eaux fluviales ont causé des maladies diarrhéiques au sein de la population locale. Les enfants en étaient les premières victimes, comme témoigne Mme Mauwa : « A plusieurs reprises, mes enfants étaient hospitalisés de suite de diarrhée sévère et de la fièvre typhoïde ».

Woman washing cookware outside as family looks on.
Mauwa fait la vaisselle avec de l’eau de la borne fontaine près de chez elle. Avec la pénurie d’eau, elle avait du mal à assurer la propreté des articles de son foyer.

La défécation à l’air libre

Outre les problèmes relatifs à l'approvisionnement en eau potable dans cette région, il a été aussi constaté un manque criant de toilettes pouvant desservir plus de 95 % de la population locale. Les rares installations sanitaires existantes ne répondaient pas aux normes requises. En conséquence, la communauté était contrainte de se soulager en pleine brousse, ce qui l'exposait à divers risques sécuritaires et sanitaires la hausse des pathologies d’origine hydrique, en particulier chez les enfants de moins 5 ans, les morsures par des reptiles, et les violences basées sur le genre, pesant en particulier sur les femmes et les enfants.

Pour Rutwe Jean-Baptiste, président du comité local de gestion des latrines, l’absence de toilettes propres causait des maladies dans sa localité. « La population de notre communauté était cible des maladies liées à l’exposition et au contact des matières fécales. Il y avait des cas de diarrhées et de choléra », détaille-t-il.

Furaha Régine, mère de cinq enfants, habitant la localité de Rwassa 2, déclare que « même ma famille faisait recours à la brousse pour nos besoins par manque des toilettes. Avec ça, mes enfants souffraient de diarrhées et de vomissements à répétition. Mais depuis la construction des toilettes par Mercy Corps nous avons retrouvé notre santé et notre dignité. »

Woman collects water from public tap.
Une des 500 latrines construites dans l’aire de santé de Kinyandonyi, offrant une alternative fiable pour éliminer la défécation à l’air libre dans cette région.

Précisions sanitaires

Bahati Ruvye Vincent, infirmier titulaire du centre de santé de référence de Kinyandonyi, explique que chaque mois, leur structure « enregistrait 20 cas de fièvre typhoïde pour les enfants de moins de 5 ans et 40 cas de diarrhée », ajoutant : « Depuis deux mois maintenant nous n’avons pas encore atteint même le quart de ces chiffres ». Comparant les données du mois de janvier 2024 où 10 cas de choléra étaient enregistrés dans son entité, à celles de janvier 2025, où aucun cas n’était enregistré, le Responsable du Centre de Santé estime que « l’approvisionnement en eau potable et la construction de 500 toilettes, a aidé l’aire de santé à réduire sensiblement les cas de certaines maladies [fièvre typhoïde et diarrhées] ».

Toutefois, Bahati plaide pour que Mercy Corps et le gouvernement britannique à travers le FCDO, interviennent aussi en faveur des populations de l’aire de santé de Binza limitrophe de celle de Kinyadonyi, qui souffrent encore des fièvres typhoïdes et des maladies diarrhéiques.

Dans le cadre du programme Assistance stratégique pour une réponse d'urgence (SAFER), financé par le Royaume Uni par l'intermédiaire de l'agence d'aide humanitaire FCDO, les systèmes d’adduction construit par Mercy Corps, desservent 56483 personnes en eau potable, et les infrastructures d’assainissement a permis à 5138 individus d'avoir accès aux latrines communautaires répondant aux normes hygiéniques, contribuant ainsi à une meilleure santé publique dans quatre villages de Kinyandoni.

Entre octobre 2024 et Mars 2025, Mercy Corps soutenu par FCDO a construit au total 128 points d’eau et 570 latrines, pour améliorer l’accès aux services d’eau et d’assainissement à 175 300 personnes touchées par le conflit au Nord-Kivu (Goma, Masisi et Rutshuru).