Conflits à l’est de la RDC : Faire face à la multiplication des crises
L’est de la République Democratique du Congo (RDC) continue à faire face à des défis humanitaires persistants liés à l'insécurité croissante dans certaines régions, et des problèmes structurels ancrés, exacerbant les besoins humanitaires. Depuis le début de l'année 2024, plus de 738 000 personnes se sont déplacées en RDC portant le total à environ 7,2 millions de personnes déplacées, dont la plupart ont fui des attaques et affrontements armés.
« J'ai grandi dans les montagnes de Kpandruma, mais la guerre nous a forcés à partir ». Ucidha Ng’agenonga Siraja, veuve, elle endure les effets des conflits dans le territoire de Djugu, en Ituri, « Nous avons été déplacés plus de dix fois, » explique-t-elle, ajoutant : « Nous sommes tantôt des déplacés, tantôt des retournés ». Confrontée aux problèmes de survie, sur fond d’une crise persistante, Siraja a perdu cinq personnes chères, à savoir son époux et quatre de ses dix enfants « Mes enfants sont morts avant l’avènement de la guerre [en 2020], Mon mari est décédé en 2016 des suites d'une maladie, me laissant seule pour m'occuper de nos enfants ». Les enfants de Siraja ainsi que son mari ont succombé à des pathologies qu’elle n’a pas pu diagnostiquer, faute d’accès aux soins de qualité.
Furaha MASIRIKA, 49 ans, a, quant à elle, fui le conflit entre l’armée congolaise et des groupes armés, autour de Goma, en province du Nord-Kivu. Elle a trouvé refuge dans le site de déplacés de Kashaka où elle a dû passer plusieurs mois sans assistance, faisant face à multiples problématiques dont les maladies d’origines hydriques « quand on est arrivé dans ce camp, il n’y avait pas d’eau. Alors, plusieurs cas de choléra étaient enregistrés et transférés à l’hôpital ou au centre de santé », se rappelle Furaha. Dans le camp de Kashaka, comme dans d’autres sites de déplacés de la région, la situation humanitaire demeure inquiétante.
En mai 2024 la Directrice Générale de Mercy Corps, Madame Tjada D'Oyen McKenna a visité ce site, ou Mercy Corps mène des actions d'envergure pour assurer l’accès à l’eau potable et à des services d’hygiène et d'assainissement dans le cadre d’un programme financé par l’Union Européenne : “Goma est de plus en plus touchée par les combats avec des groupes rebelles qui s'emparent de zones très proches, à 10 ou 15 km, et la population est donc en grande difficulté” a constaté Tjada.
Sauver des vies
Depuis novembre 2019, Mercy Corps avec quatre autres organisations, ACTED, Concern Worldwide, Norwegian Refugee Council et Solidarités international se sont unis au sein d'un Consortium pour délivrer l'Assistance Stratégique pour la Réponse d'Urgence en RDC (SAFER); un programme conjoint visant à harmoniser la réponse d'urgence parmi les acteurs humanitaires dans le pays, avec pour objectif global de permettre aux ménages affectés par les conflits et les chocs de répondre à leurs besoins de base avec dignité. Ce programme soutient l’accès sûr et équitable à l'aide financière à usage multiple basée sur le marché (TMUM) et aux services de base en matière d'eau, d'assainissement et d'hygiène (WaSH).
Siraja espère pouvoir répondre aux besoins de son ménage, avec l’argent reçu à Fataki en février 2024, dans le cadre du financement de l’Union Européenne et la Direction du Développement et de la Coopération Suisse (DDC) au SAFER: « Grâce à cette assistance financière, je vais investir dans l'agriculture, payer les frais scolaires pour mes enfants, et assurer notre subsistance alimentaire », dit-elle avec détermination.
Pendant ce temps, à Goma, Furaha a rejoint le groupe des 125 relais communautaires, ces volontaires formés pour sensibiliser sur les pratiques clés de l’hygiène les 33.725 personnes déplacées internes qui s’abritent dans le site de Kashaka. Furaha s’assure également que les infrastructures d’eau et d’assainissement construites dans ce lieu par Mercy Corps avec le financement de l’Union Européenne sont salubres, dans le cas ou l'entretien n’est pas assurée, Furaha peut contacter Mercy Corps pour un soutien. « Dieu merci, d’autres déplacés prennent au sérieux nos sensibilisations sur la lutte contre le choléra et ils mettent en pratique ce que nous leur apprenons car cette épidémie tue rapidement », dit Furaha avec un ton de satisfaction.
Entre juin 2023 et mars 2024, le projet SAFER a distribué de l’argent liquide à 102 479 ménages, construit et réhabilité 122 points d’eau et 514 latrines publiques pour les déplacés. En plus, les sensibilisations à l’hygiène ont atteint 218 644 personnes alors que 108 champions de protection ont été formés sur des thèmes transversaux afin de renforcer les mécanismes de protection communautaire, pour la promotion de la Protection et du Genre.
Malgré ces énormes efforts des acteurs humanitaires, il est nécessaire de faire encore plus vu les besoins qui s’intensifient. Tjada appelle à plus de mobilisation autour de la situation de la RDC “Nous demandons premièrement un financement et une attention accrus. La deuxième chose qui est vraiment urgente, c'est beaucoup d'efforts politiques et diplomatiques pour pousser à une solution de paix, parce que sans cela, c'est toute une génération que nous perdons”, a alerté la Présidente de Mercy Corps.
A propos du projet
Le projet SAFER : Assistance stratégique pour la réponse d'urgence en RDC est financé par le Bureau d’Assistance Humanitaire de l’USAID (BHA), le Bureau des affaires étrangères, du Commonwealth et du développement du Royaume Uni (FCDO), l'agence d'aide humanitaire des pays de l'Union européenne (ECHO) et la Direction du Développement et de la Coopération de la Suisse (DDC) en tant que consortium de cinq membres avec Mercy Corps comme chef de file.
Depuis 2019 ce projet a déjà touché plus de quatre millions de personnes, en ciblant les ménages les plus vulnérables, parmi les déplacés, les retournés et leurs hôtes.